Les grandes philosophies by Dominique Folscheid

Les grandes philosophies by Dominique Folscheid

Auteur:Dominique Folscheid [Folscheid, Dominique]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Philosophie
Éditeur: PUF
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


III. Rousseau

1712-1778. – Rousseau est le marginal des Lumières. Fils d’artisan genevois, autodidacte, menant une existence hors des usages, il continue à déranger. Son refus de faire du progrès scientifique et technique la clef du progrès moral lui a valu de solides inimitiés parmi les « philosophes » et semble le situer à part, ailleurs. Rousseau traite les mêmes problèmes, travaille sur les mêmes thèmes (Dieu, la Nature, la liberté, la société, le bonheur) que ses rivaux, mais autrement, selon une autre logique. À la fascination pour les processus mécanistes, les constructions – bref : les médiations – il oppose la loi de l’immédiateté, comme principe et comme méthode.

1. La recherche de l’immédiat. - Comment découvrir la véritable nature de l’homme pour bien juger de son état présent et y porter remède ? Tel est le problème fondamental posé par Rousseau, qui renouvelle à sa manière un discours stéréotypé.

La difficulté est considérable : l’homme actuel est corrompu, perverti. Les « sauvages » exotiques le sont aussi. Tout ce que l’on pourrait constater étant faussé, la bonne méthode consiste à « écarter tous les faits » (Discours sur l’origine de l’inégalité, préface). Prenons donc l’homme actuel, dépouillons-le de tout ce qui ne relève pas de la nature, reste l’homme naturel. Le « sauvage » est donc un ensauvagé, produit par soustraction. Le résultat se présente comme une équation : homme naturel + acquis artificiel = homme actuel. Selon la lecture, on saisira le naturel ou l’artifice. Évidemment, l’ensemble forme un cercle, à prendre ou à laisser en bloc. Si l’on prend, toute la suite se développe avec une rigueur implacable.

L’exotisme et l’histoire ne fournissent que le décor de ce postulat spéculatif : l’homme est naturellement homme (et non un produit artificiel), immédiatement humain (sans passer par la société, etc.). Il en résulte que le mal qui le dénature, le déshumanise vient d’ailleurs, de l’artifice. Dévêtu de tout ce que l’on croyait être proprement humain, l’homme naturel nous apparaît comme un être solitaire, sans famille, sans Cité, sans langage (sinon le « cri de la nature »), sans loi, innocent (situé en deçà du bien et du mal, et non pas « bon »), étranger au travail. L’homme n’est plus un animal raisonnable ou un animal politique. Asocial et associable, il n’est au fond qu’un animal comme les autres, à cette différence près qu’il est libre.

La fiction écartée, on comprend que cet homme originel est en nous, qu’il est nous-mêmes, sous les déformations accumulées et sédimentées. La vraie recherche de l’origine passe donc par une ascèse et une anamnèse personnelles. Le point le plus éloigné de notre passé mythique est le point le plus profond de notre intériorité. Cela ne se prouve pas, ne se démontre pas, cela s’éprouve et se sent. L’immédiateté (l’identité naturelle) se découvre immédiatement.

2. Dénaturation et aliénation. - Tel un substitut de l’Histoire sainte, le discours de Rousseau peut maintenant nous conduire du stade naturel originaire à celui de la dénaturation. Mais la « chute » de l’homme est paradoxale.



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